L'écume des lettres      Proprièté familiale depuis 1995
    Français  
Acheter Un Noël blanc
 
 
Le mot
Le mot est un être vivant, il est né, s'est transformé souvent, puis généralement stabilisé. Tous les jours il se crée pour tel ou tel mot des sens nouveaux. Si constamment il se crée des mots nouveaux, d'autres a contrario meurent ou tombent en désuétude.
Les mots ont donc une histoire, il en est de même de la langue, et notre syntaxe actuelle et différente de celle du 17e siècle. La place du pronom personnel complément n'était pas la même qu'aujourd'hui. La subordonnée infinitive était plus fréquente que de nos jours, alors le français était encore proche de la syntaxe latine
L'emploi de l'infinitif prépositionnel complément circonstanciel, de même que celui du gérondif était plus lâche que de nos jours où leur sujet, même non exprimé doit être le même que celui du verbe dont ils dépendent (Rends le moi sans te fouiller - Molière)
L'emploi de l'auxiliaire dans les temps composés a longtemps été hésitant (Le traître est expiré - Racine, ou Je n'ai point sorti - Mme de Sévigné).De grandes étapes jalonnent l'histoire de notre langue.


La période de formation
La conquête romaine : (César - Ier siècle Av JC)
Les gaulois peu à peu, mais à leur façon, adoptent le latin, qu'on nomme le latin vulgaire. C'est l'époque peut on dire Gallo-romaine de la langue. C'est dès cette période que la langue synthétique et flexionnelle qu'elle était devient analytique et se crée une syntaxe nouvelle et déjà très moderne.
Ex :Capiantur : Un seul mot, le latin est une langue synthétique, se traduit par qu'ils soient pris, soient quatre mots, le français est une langue analytique, et encore Rosae pulchrido, deux mots, se traduit par la beauté de la rose, en cinq mots. La disparition progressive des flexions, des cas, a amené le français à fabriquer des articles, à multiplier l'emploi des prépositions, à modifier l'ordre des mots, l'ordre syntaxique et en particulier à placer le déterminant, complément où épithète, après le nom déterminé, à mettre le sujet devant le verbe, les compléments après le verbe..


La période franque (6e au 10 siècle)
Les invasions germaniques ont non seulement teinté le vocabulaire, mais contrecarré l'évolution du gallo-romain, par des habitudes propres aux idiomes germaniques.
Par exemple l'inversion du sujet, le déterminant précédant le déterminé, comme dans Francourville, domaine des francs, voire l'antéposition de l'épithète conservée dans d'anciens composés ou des expressions clichées, le vif-argent, à plat ventre, la basse ville… C'est l'influence germanique, et surtout franque, qui jointe aux vivaces survivances gauloises, achève de rendre notre langue vulgaire et originale par rapport aux autres langues latines. La nouvelle langue s'allège, s'organise, se personnalise, la déclinaison se réduit à deux cas, le cas sujet, et le cas régime. Première lettres de noblesse, c'est elle et non plus le latin, qu'on va utiliser dans le célèbre Serment de Strasbourg en 842, premier monument littéraire français.


C'ancien français (10e - 14e siècles)
Cette langue vulgaire n'était pas unique, elle variait selon les régions d'où un certain nombre de dialectes, émiettement linguistique favorisé par l'anarchie féodale qui suivi la dynastie carolingienne. On distinguait deux groupes principaux, le groupe nord ou langue d'Oïl, et le groupe sud ou langue d'Oc, ainsi appelée d'après leur façon de prononcer le futur "Oui" français. La langue d'Oïl regroupait quatre dialectes principaux, le francien de l'Ile de France, le picard, le normand, le bourguignon. La langue d'Oc groupait l'auvergnat, le limousin, le gascon, la catalan, et le provençal.
Mais la dynastie des capétiens, avec surtout Philippe Auguste, Saint Louis et Philippe Lebel, va donner un essor décisif au dialecte de l'Ile de France qui ira croissant avec le progrès de l'unité nationale.
Du 11e au 15e siècles, Paris commence à rayonner, son université s'impose dès le 12e siècle, et ce dialecte, le francien va non seulement supplanter peu à peu tous les autres dialectes, mais le français naissant va rayonner hors des frontières nationales. La conquête de l'Angleterre en 1066 introduira le français pour quelques siècles à la cour et dans l'aristocratie anglaises.
Une autre dynastie normande s'installe dans les deux Siciles.
L'état chrétien fondé en Palestine après la 1ére croisade y transporte le français, c'est en cette langue que sont rédigées les assises de Jérusalem
Un écrivain italien du 13e siècle, Brunetto Latini, dédaignant sa propre langue opte pour le français qu'il dit "parleure plus delitable et plus commune à toutes gens".
La langue continue cependant son évolution, la déclinaison à deux cas se maintient encore dans la langue écrite, mais dans la conjugaison la création d'un conditionnel calqué sur le curieux futur français contribue au recul du subjonctif. Quant aux tendances germaniques (inversion, déterminant + nom), elles s'estompent mais laissent des traces suffisantes pour permettre des nuances d'expression intéressantes.


   
Le moyen français 14e - 16e siècles
La fin du moyen âge est une période troublée, les Valois n'ont pas la sagesse des Capétiens, mais quelques grands rois, comme Charles V, Louis XI, François Ier, poursuivent heureusement leur tâche en vue de l'unité. LA menace anglaise est écartée (Jeanne d'Arc et Charles VII) la puissante maison de Bourgogne s'effondre (Louis XI) et par un mariage Charles VIII annexe la Bretagne. L'unité est accomplie.L'évolution de la langue vers son aspect moderne se précipite, la déclinaison à 2 cas disparaît au cours de la guerre de Cent ans et c'est le cas régime qui triomphe, le S devient la marque du pluriel, la conjugaison aussi se simplifie, l'emploi de l'article s'étend encore... La Renaissance et les efforts de la Pléiade font faire à la langue un pas décisif, en même temps que le vocabulaire s'enrichit considérablement.


Pe français classique (1610-1789)
Période d'ordre, de stabilisation dans tous les domaines. La langue en réaction contre l'effervescence du 16e s'épure. Les évolutions phonétiques s'arrêtent.
La morphologie grâce aux efforts des grammairiens se stabilisent
La place des mots, encore flottante chez Corneille va se fixer au 17e siècle et surtout au 18e.
La place de l'épithète va permettre des distinctions intéressantes (un brave homme, un homme brave; le même courage, le courage même, et l'on ne pourra plus placer les pronoms personnels compléments à façon d'un Corneille : "Va, cours, vole et nous venge", ou d'un La Fontaine "Jamais s'il me veut croire, il ne se fera peindre"... sauf par souci d'archaïsme.
La langue française atteint la perfection chez les grands classiques du 17e et 18e siècles et rayonne sur toute l'Europe intellectuelle, c'est ainsi que l'Académie de Berlin avait tout naturellement mis au concours pour le prix de l'année1784 les questions suivantes : qu'est ce qui a rendu la langue française universelle, pourquoi mérite-t-elle cette prérogative? Est il à présumer qu'elle la conserve ?. On sait que le lauréat fut Rivarol, pour son Discours sur l'universalité de la langue française. Le français ne se contente pas de ce rayonnement européen, il triomphe peu à peu des dialectes régionaux, dans les pays d'Oïl au 17e et les pays d'Oc au 18e. Et triomphe définitif il supplante le latin dans les domaines qui lui étaient réservés, comme la philosophie, ainsi Descarte écrit son Discours de la méthode en français, les sciences (Pascal, Fontenelle, Buffon). Quant à la poésie en latin encore pratiquée au 17e elle meurt au 18e, et le français gagne de plus en plus dans les collèges et les universités


Le français moderne (1789-à nos jours)
La révolution n'a guère ébranlé les traditions grammaticales. A part quelques prononciations populaires adoptées par la bourgeoisie parisienne. Oi triomphe de oué, et Louis XVIII fait sourire à son retour d'exil en disant "C'est moué le roué", la langue ne diffère guère de celle du 18e siècle, mais l'orthographe se fait impérieuse et devient signe de bonne éducation et d'instruction. Quant au vocabulaire il continue de s'enrichir, emprunts anglais, allemands, exotiques, savants, avec les progrès technique, argotiques) mais on note déjà une tendance à l'ellipse avec un raccourcissement des phrases et des mots, une condensation des de l'expression). A noter que la révolution a lutté contre les dialectes parce qu'elle voyait en eux un obstacle à l'unification de la France, il est certain qu'en 1914 avec l'école obligatoire, le nombre des français ignorant la langue française s'était considérablement amoindri. Et les autorités peuvent désormais tolérer sans crainte l'étude des dialectes et des langues régionales.
La langue a résisté aux deux guerres mondiales, mais elle fait preuve de négligence s inquiétantes, avec des abus d'adjectifs comme formidable, des mots passe partout comme chose, machin, truc de la simple intonation sans l'interrogation "Tu viens ?", répugnance à employer correctement le subjonctif, ellipses abusives, et certain écrivains pour faire vrai malmènent la syntaxe officielle. Mais s'il importe de défendre la pureté, la clarté et l'harmonie de la langue, il est vrai aussi qu'il ne faut pas en faire une langue morte.